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La course au(x) vaccin(s)

Revue de presse du 8 décembre 2020

mercredi 9 décembre 2020, par Antoine BOURGE

La course au(x) vaccin(s) met en évidence d’un côté la formidable capacité à répondre par la recherche scientifique à une pandémie mais d’un autre côté elle laisse entrevoir la confiscation de ce bien commun qu’est le vaccin. Celui-ci fait le jeu des prédations capitalistiques les moins subtiles et confirme la mainmise de l’UE sur les États-membres.

Les vaccins anti-COVID

Les tests les plus avancés

 Le Monde :

« Il y a 48 candidats-vaccins en essai clinique sur l’homme, selon un décompte réalisé le 12 novembre par l’OMS. Parmi ceux-ci, onze sont en phase 3, la dernière étape qui consiste à tester l’efficacité du vaccin à une grande échelle. (…) trois avec des taux d’efficacité supérieurs à 90 %, donc bien au-delà des 50 % recommandés par l’OMS : l’alliance germano-américaine Pfizer/BioNTech ; la société américaine Moderna ; l’Institut de recherche russe Gamaleïa. »

Mutations

 Le Monde :

« Selon l’Inserm, « plusieurs dizaines de mutations du SARS-CoV-2 ont déjà été décrites, sans que des conséquences sur l’épidémie aient été mises en évidence ». Ainsi, les mutations du matériel génétique du virus de départ n’ont pour l’heure pas d’impact sur les vaccins en cours de développement. Dans le cas où d’importantes mutations du SARS-CoV-2 seraient observées, les laboratoires en tiendraient probablement compte : « S’il mute de façon plus importante, peut-être faudra-t-il adapter le vaccin périodiquement, comme on le fait chaque année pour la grippe saisonnière », a estimé Marie-Paule Kieny. »

Pharmacovigilance française efficace

 Huffpost :

« La pharmacovigilance assure le suivi de l’état de santé des vaccinés, mais elle ne permet pas de démontrer et de comprendre comment un traitement peut causer des effets secondaires. Lorsqu’un médecin ou un patient signale un effet indésirable grave aux équipes régionales des centres de pharmacovigilance, ces dernières alertent l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM). C’est cette autorité, en lien avec l’Agence européenne du Médicament, qui est chargée d’établir le lien entre l’état de santé du patient et la molécule administrée, en lançant des études. »

Pas de vaccination pour les jeunes

 L’Humanité :

« Les mineurs ne sont pas concernés par les différentes phases de la stratégie vaccinale présentée par la Haute Autorité de santé (HAS). Ils ne font pas l’objet de recommandations, car les études cliniques les plus avancées n’ont pas inclus cette population, a expliqué l’Autorité, notamment car ils n’apparaissent pas comme des vecteurs importants de transmission du virus. «  L’autorisation de mise sur le marché ne sera pas délivrée pour les enfants, puisqu’il n’y aura aucune donnée d’efficacité et surtout de tolérance vis-à-vis de cette population », a indiqué Daniel Floret, membre de la commission technique des vaccinations de la HAS. »

Faire du vaccin un bien commun

Un bien commun ?

 Le Monde :

« Les vaccins relèvent depuis 2006 de l’ADPIC, un accord international sur la propriété intellectuelle reconnu par l’Organisation mondiale du commerce (OMC) qui permet aux laboratoires de fixer librement le prix de leurs produits médicaux.

En octobre, l’Inde et l’Afrique du Sud, avec le soutien du Kenya, de l’Eswatini et de multiples représentants de la société civile, ont tenté de faire adopter un texte libérant provisoirement les vaccins des brevets qui les protègent juridiquement afin de permettre une production plus large et plus abordable. Ce texte a toutefois été rejeté mi-octobre, notamment par les pays possédant une importante industrie pharmaceutique, regrette Amnesty International. »

Vacciner tout le monde ?

 L’Union :

« Les autorités sanitaires françaises ont recommandé lundi de vacciner en priorité les résidents des Ehpad contre le Covid-19, posant le calendrier d’une campagne à hauts risques pour le gouvernement, qui devra convaincre les réticents et assurer une logistique sans faille.

Avec plus de 16 000 morts parmi leurs résidents (sur un total de 52 000) et des restrictions de visites drastiques des familles, les Ehpad ont payé un très lourd tribut à l’épidémie de Covid-19.

Le calendrier proposé par la HAS se décline ensuite en quatre autres phases : les personnes âgées (en priorité les 75 ans) et les personnels sanitaires, puis les plus de 50 ans, ensuite les personnes dont le métier favorise une infection et les personnes vulnérables et en précarité, et, enfin le reste de la population. »

Problèmes de logistique

 Le Monde :

« Le transport et le stock des vaccins représente un défi logistique important. Les lieux de production, les températures de conservation requises (le candidat-vaccin de Pfizer/BioNTech doit être conservé à – 70 °C, donc dans des congélateurs spéciaux). »

La piste de l’ICE

 L’Humanité :

« Éradiquer la pandémie est aussi une affaire populaire. Un collectif international a lancé, lundi, une initiative citoyenne européenne (ICE) pour exiger un accès généralisé aux vaccins contre le covid, une transparence sur les contrats signés par les États avec les multinationales (voir ci-contre), et une limitation du droit de propriété intellectuelle pour permettre une production massive de sérum. En France, l’ICE est portée par un collectif rassemblant des ONG, tels Oxfam, la CGT, Solidaires, le Parti communiste français (PCF) et la France insoumise (FI). « Il ne faut pas permettre de profits sur les vaccins, de faire du profit sur la pandémie ! » expliquait, lundi, Fabien Roussel, secrétaire national du PCF, à l’occasion d’une conférence de presse présentant l’ICE. »

Et plus loin :

« Une initiative citoyenne européenne est une démarche qui oblige le Parlement européen, si un million de signatures sont collectées dans au moins sept pays, à examiner une législation sur un sujet donné. »

UE, vaccins et gros sous

Le Royaume-Uni, qui sera bientôt sorti de l’UE, est le premier à se lancer dans la vaccination

 Le Monde :

« Le Royaume-Uni a donné son feu vert, mercredi 2 décembre, pour la mise sur le marché du vaccin de Pfizer et BioNTech. Il devient ainsi le premier pays au monde à le faire. L’Union européenne (UE) pourrait donner son aval aux vaccins de Pfizer et Moderna à la mi-décembre. »

Dépendance de la France à l’UE

 Le Monde :

« Les doses françaises dépendent directement de l’Union européenne (UE), qui est chargée de passer des précommandes auprès des laboratoires. L’UE répartit les doses entre chaque Etat-membre. (…) la ministre déléguée à l’industrie, Agnès Pannier-Runacher, a assuré récemment que 15 % des doses précommandées par l’UE seraient réservées à la France. »

Gilead et son ’remdésivir’, l’arnaque à 1 milliard d’euros

 RT France :

« Le 8 octobre, la Commission européenne annonçait satisfaite avoir passé un important contrat avec le laboratoire Gilead d’un montant d’un milliard d’euros pour la commande de 500 000 doses de remdésivir. Cette molécule utilisée dans le traitement contre Ebola devait pouvoir lutter contre le Covid-19 avant que l’on se rende pourtant compte de son inopérance. »

(…)

« Le scandale a éclaté le 20 novembre, lorsque l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a rendu publique sa recommandation de ne pas administrer le traitement en raison de son inefficacité contre le Covid-19. L’OMS pointe même « la possibilité d’importants effets secondaires » sur les reins, entre autres, ainsi que son coût important et la lourdeur du traitement. »

(…)

« A la suite de la décision de la Commission européenne, de nombreux pays européens ont passé commande et se retrouvent désormais dans l’obligation d’honorer leur contrat pour un médicament au prix de 390 dollars la dose, soit 2 340 dollars (1 970 euros) pour un traitement à l’efficacité contestée. Le laboratoire justifie le prix de son médicament par « une sortie plus rapide de l’hôpital [qui] permettrait de faire une économie d’environ 12 000 dollars par patient. » Ainsi la firme estime avoir « décidé de fixer le prix du remdésivir bien en dessous de ce montant ». »

(…)

« Le traitement s’est révélé dans un premier temps une aubaine pour l’action du groupe sur les marchés financiers. Gilead a vu le prix de ses actions en bourse passer de 65,23 dollars à 84 dollars entre l’annonce des résultats in vitro favorables en janvier et l’autorisation d’utilisation d’urgence aux Etats-Unis le 1er mai, avant de lentement dégringoler au fil des critiques scientifiques pour atteindre la valeur de 59,5 dollars, à la suite des dernières annonces de l’OMS du 20 novembre. »

La clause de non responsabilité

 L’Humanité :

« Dès l’été, AstraZeneca se gargarisait, par exemple, d’obtenir, lors des précommandes de ses doses par les grandes puissances capitalistes, une clause de transfert de responsabilité aux pouvoirs publics des pays acheteurs. Au mois d’août, le Financial Times a révélé un mémo ­interne de Vaccines Europe, la branche spécialisée du lobby pharmaceutique européen, qui exigeait une protection juridique de l’Union européenne en cas d’incident : « La rapidité du développement comme l’échelle du déploiement (des vaccins ­anti-Covid-19 – NDLR) rendent impossible la constitution du nombre habituel de preuves qui seraient normalement disponibles à l’issue de la phase intensive d’essais cliniques », lit-on dans ce plaidoyer pour un transfert de la responsabilité aux États en cas de pépin non repéré avant la vaccination massive »

(…)

« Dans une réponse à l’eurodéputé belge Marc Botenga, membre du groupe de la Gauche unitaire européenne (GUE-NGL), elle cite un extrait d’une directive, datant de 1985, sur la « responsabilité du fait des produits défectueux », qui protège les entreprises lorsque « l’état des connaissances scientifiques et techniques au moment de la mise en circulation du produit n’a pas permis de déceler l’existence du défaut ». « Si la société n’est pas tenue pour responsable, elle ne sera pas tenue de verser une indemnisation », ajoute Stella Kyriakides. »

Cobayes ?

Déficit de confiance

 Mediapart :

« Selon une récente étude de la fondation Jean Jaurès, la confiance des Français envers les scientifiques a baissé de plus de vingt points entre le début de l’épidémie et le mois d’octobre, ce qui est une conséquence directe de ce contexte. »

(…)

« Pour l’instant, on ne peut pas dire beaucoup de choses sur ce vaccin, car on a seulement les annonces des laboratoires. On peut déjà s’interroger sur les études cliniques : sont-elles conduites sur un échantillon suffisant de population et sur une période assez longue pour repérer d’éventuels effets indésirables ? Moi-même, j’ai besoin d’être convaincue, même si je ne crois pas à des forces occultes qui tirent les ficelles ! Selon des sondages, près de la moitié des Français ne veulent pas se faire vacciner contre le Covid. Mais ce ne sont pas tous des anti-vaccins, ce scepticisme est lié au contexte actuel d’incertitudes à l’égard de ce vaccin. La proportion de militants anti-vaccins en France demeure limitée, entre 5 à 10 % de la population française. Les autres ont besoin d’être convaincus. »

Ajuster les recommandations... mais à quel point ?

 Huffpost :

« “Le suivi des vaccins dans la population générale permettra d’identifier de possibles effets indésirables rares propres à chaque molécule”, expose Daniel Floret, vice-président de la commission technique des vaccinations à la Haute Autorité de Santé. Le professeur espère pouvoir s’appuyer sur les données récoltées au fur et à mesure de la campagne de vaccination pour ajuster ses recommandations. »

Pas d’obligation dit Macron

 RT France :

« Alors que la France sort progressivement d’un second confinement, le chef d’Etat a abordé également la question de la vaccination contre le virus. Il a confirmé que la vaccination ne serait pas obligatoire, en ajoutant que, selon lui, « c’est contreproductif de rendre le vaccin obligatoire sur des vaccins qu’on connaît mal » .« On ne sait pas tout sur ce vaccin, comme on ne sait pas tout sur le virus. On ne répond pas à la défiance par l’obligation », a-t-il conclu sur ce point. »

Un Japon prudent qui attend les retours d’expériences aux USA et en Europe

 Marianne :

« Si les autorités nippones se sont rangées à la vaccination de masse, elles n’entendent pas pour autant précipiter les choses et la campagne ne débutera vraisemblablement pas avant le second trimestre 2021. Tokyo veut d’abord s’assurer que les vaccins proposés n’auront pas d’effets secondaires indésirables. Et à leurs yeux, rien de mieux pour le savoir que d’étudier ce qui va se passer dans les pays occidentaux où les campagnes de vaccination débutent ou sont sur le point de commencer. Opinion partagée par une population encore très méfiante. « Je ne crois guère à l’efficacité de ces vaccins et les Japonais ne se feront vacciner que s’ils sont sûrs de leur efficacité » (…). »

Antoine Bourge

Le 8 décembre 2020