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Élections, 1er mai et lutte des classes

dimanche 1er mai 2022, par Jacques COTTA

La pièce qui se joue depuis 40 ans en dit long de la dépolitisation générale des partis aujourd’hui groupusculaires qui ont occupé le terrain de la gauche durant des décennies. À chaque élection, l’épouvantail FN puis RN est agité pour interdire tout débat sérieux permettant aux citoyens de se déterminer sur les véritables choix économiques, sociaux ou démocratiques. Au nom du « fascisme », la cause est entendue. Puis entre les élections le FN, puis RN, est remis en selle, considéré comme le parti d’opposition au pouvoir, pour être à nouveau utilisé comme il se doit aux élections suivantes. Dès 1987, François Mitterrand avait innové la recette avec l’aide de médias conciliants et de journalistes à disposition. Les plus anciens auront en mémoire François-Henri de Virieu, et l’apparition dans son « heure de vérité » sur Antenne 2 de Le Pen Père faisant « un tabac médiatique ». En 1995, bis repetita, puis en 2002 Chirac sortait victorieux avec un score de Maréchal de sa confrontation contre Le Pen père. L’élection d’Emmanuel Macron s’inscrit dans cette lignée. Seule différence, c’est Le Pen fille qui a pris la place du fasciste à défaire.

Que cela soit payant électoralement ne fait aucun doute. Mais politiquement, quelle misère ! Au nom de l’antifascisme qui en l’occurrence n’a aucun sens, la gauche appelle systématiquement au fameux front républicain qui organise peu à peu sa disparition de la vie politique, et de la carte électorale française. La dernière élection présidentielle a constitué un modèle du genre. Macron, représentant du capital financier, européiste, fossoyeur de la Nation, liquidateur de nos valeurs qui a œuvré durant 5 ans, se trouve reconduit comme le défenseur de la démocratie, rempart contre la « bête immonde ». Outre le résultat, cette dépolitisation générale aboutit à une désaffection démocratique que tous les commentateurs font mine de déplorer. Macron est élu avec l’assentiment d’un français sur cinq seulement en droit de voter, et concentre ainsi dans ses mains les pouvoirs exorbitants que lui confèrent les institutions de la 5e république.

Passée donc la période électorale, les vrais sujets sont là, et vont s’imposer avec d’autant plus de violence que l’heure du remboursement du « quoi qu’il en coûte » ordonné par l’Union européenne, sur fond de politique austéritaire, va sonner. La période des élections législatives ne devrait accorder qu’un faible sursis, et le 1er mai, fête internationale des travailleurs, nous rappelle en toute logique la réalité. La vie chère, l’impossibilité pour des millions de finir le mois, dix millions de citoyens vivant sous le seuil de pauvreté, les menaces annoncées contre les retraites dont l’âge devrait être porté à 65 ans, la réduction des services publics et des personnels, la transformation de l’école en école entreprise, la situation de la santé, quelques autres joyeusetés sont maintenant à l’ordre du jour. La force de Macron, bien mal élu, minoritaire dans l’opinion comme dans les urnes, réside dans le néant qui lui est opposé.

Non seulement la « gauche » politique a appelé à voter pour lui, mais les organisations telles CGT et CFDT qui pour l’occasion ont réalisé « l’unité syndicale ». Ajoutons à ce tableau la presse unanime, ou encore des associations d’avocats ou de magistrats qu’on avait connues plus silencieuses lorsque les Gilets jaunes se faisaient violenter, arrêter, et priver de liberté de façon totalement arbitraire, pour concevoir qu’il n’y a décidément pas grand-chose à quoi se raccrocher.

Les dés seraient donc jetés pour tout un temps. Il serait à nouveau « minuit dans le siècle ». Il n’y aurait plus rien à faire, juste à subir. Mais une telle conclusion revient à oublier l’essentiel. Ce ne sont pas les appareils ou appareillons qui font l’histoire, mais les classes sociales. Nul doute que la lutte des classes prendra à revers tous ceux qui considèrent que les dés sont jetés.

Jacques Cotta
Le 1er mai 2022

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