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Victoire dans la rue, et maintenant ?

mercredi 1er février 2023, par Jacques COTTA

1, 2, 3 millions… La traditionnelle guerre des chiffres a peu d’importance. Dans chaque ville les manifestations du 31 janvier pour le retrait de la réforme des retraites ont battu tous les records, dépassant de loin les pronostics les plus optimistes.

Emmanuel Macron et son premier ministre Elisabeth Borne ont annoncé depuis plusieurs jours que "le recul de l’âge de la retraite à 64 ans et l’accélération de la réforme Touraine, c’est à dire l’augmentation du nombre d’années de cotisations nécessaires pour avoir une retraite complète, cela n’était pas négociable".

Macron et Borne obéissent à l’union européenne et au FMI qui poussent ouvertement à l’adoption de cette réforme. De toute évidence, cette réforme est « ni sociale, ni économique, mais politique ». Macron met la barre très haut. Du coup, dans les rues de France, rejet de la réforme va de pair avec Macron démission ! Syndicales, les manifestations sont chargées de fait d’un contenu politique.

Au passage, la gauche qui aux dernières élections présidentielles a appelé à élire Macron au prétexte que son opposante était Marine Le Pen porte une part de responsabilité essentielle dans la situation présente. Pour sa violence politique et physique, Macron n’a rien à envier à personne.

Macron et Borne sont détestés. Ils voudraient jouer les fauteurs de troubles, les provocateurs, les terroristes organisateurs de violence, ils ne feraient pas mieux. Quelle issue laissent-ils en effet aux millions qui descendent dans la rue et qui expriment sans ambiguïté leur refus de voir leur retraite ou celle de leurs enfants attaquée, et leur pension amputée.

Dés lors la seule question qui vaille est la suivante : et maintenant, que faire ?

Traditionnellement les journées d’action succèdent au journées d’action jusqu’à épuisement des troupes. De toute évidence cela ne saurait répondre à la situation. Dans cette éventualité, l’espoir réside dans la détermination de corporations qui comme les cheminots en 1995 casseraient le train-train établi en durcissant le mouvement sur la ligne du blocage.

Traditionnellement aussi, l’amorce de soit-disant négociations sur des points de détail sont censées faire avaler la pilule aux citoyens qui demandent eux le retrait pur et simple de la réforme. Mais une telle stratégie a pour le moment peu de chance de vaincre la mobilisation massive des Français, d’autant qu’une série de raisons viennent renforcer la détermination contre ce gouvernement, l’augmentation des tarifs d’électricité de 15% à compter du 1er février, l’augmentation du prix de l’essence, du gaz-oil, l’inflation, et autres joyeusetés qui rendent la vie impossible.

Les recettes traditionnelles qui permettent au gouvernement de trouver une porte de sortie ont aujourd’hui du plomb dans l’aile. Les manifestants sont déterminés. C’est le retrait qu’ils veulent, pur et simple, et non un aménagement synonyme d’attrape-couillons. Ils ont réalisé l’unité de leurs organisations sur le seul mot d’ordre « non au recul à 64 ans » et y sont attachés. Tous les discours sur une prétendue bataille d’amendements à l’assemblée ne dupent personne.

C’est donc aux organisations syndicales que le défi est posé. Il est de leur ressort de définir la voie, de donner les moyens aux millions de décider.

Macron veut l’épreuve de force, il faut donc définir la façon de relever le gant.

Pour mettre en échec Macron, Borne, l’union européenne et le FMI qui indiquent leur attachement à la réforme, il n’y a d’autre solution que le blocage du pays. C’est cela que les syndicats devraient expliquer clairement, et pour cela, pour décider, des assemblées générales pourraient être organisées partout. La décision de la grève reconductible devrait être prise. Des brigades de soutien à la grève —soutien financier notamment— devraient être mises en place. La population dans son ensemble devrait trouver son champ d’action. Soutien aux grévistes dans les entreprises, soutien public en reprenant par exemple les ronds-points comme les Gilets jaunes ont su le faire…

Macron veut la guerre.
Il peut être défait !

Jacques Cotta
Le 1er février 2023

Messages

  • Texte sympathique mais ne prenant pas en compte la situation réelle :
    – un temps législatif de 50 jours, après quoi une partie des syndicats risquent d’en rabattre au motif qu’ils ne peuvent rien face à la loi… sans parler de miettes possibles pour les amadouer.
    – Des grèves dans des secteurs para-publics qui, déjà, commencent à se réduire lors de la 2e manif nationale ; ne parlons pas du secteur privé
    – Des partis de gauche, tels que La France insoumise dont on se souvient la manif à 14 000 manifestants (la construction de l’appareil au risque de minorer le mouvement), qui représentent peu : 23 % au 1er tour de la Présidentielle pour l’ensemble (y compris divers gauche) ; 15,4 % au 1er des Législatives et 14,4 au 2e.
    – Un nombre de manifestants important (1,2 millions, le chiffre de la police est le plus souvent proche de la réalité) mais pas suffisant au stade actuel pour rendre crédible l’idée de déclenchement d’une grève générale.
    Pour faire court, texte qui ne prend pas en compte l’état de fatalisme et de lassitude des Français, ce qui nécessite d’imaginer une profondeur stratégique différente… un processus constituant.

  • Macron ne peut pas lâcher sa réforme.
    Son avenir est bouclé, il lui reste 4 ans à gouverner, pas de 3ème mandat. donc il peut maintenir contre vents et marées les 64 ans et 43 ans d’annuités, après lui "le déluge". Il se fiche de l’avenir de "Renaissance" car c’est un mouvement-parti créé uniquement autour de sa candidature. Ensuite, sa gestion : "tout part de moi, tout revient à moi", ne peut que confirmer son désintérêt de la survie ou non de son mouvement-parti.
    Bref, effectivement pour briser cette réforme, il n’est qu’un seul moyen : un mouvement fort unitaire et sur une longue durée.
    Un remake de 1995 est-il possible ? rien n’est moins sur. Le mouvement social n’est plus le même, l’éclatement du travail et sa transformation ont réduit l’influence des syndicats, le chômage et les petits boulots à répétitions, la précarité, auxquels viennent se rajouter maintenant, l’inflation et les conséquences économico politiques de la guerre en Ukraine, après la crise de la Covid 19.
    C’est une nouvelle configuration sociale.
    D’autre part on voit apparaître un nouveau thème scandaleux "les vieux coutent cher" qui cherche à diviser les générations entre elles et remettre en cause la solidarité générationnelle pour l’orienter vers la retraite à capitalisation et le risque financier. Macron et son gouvernement ont fait ce chantage honteux : ou 64 ans ou réduction des pensions".
    Du côté des "politiques", qui peut reprendre ce combat à l’assemblée nationale ? La Nupes ? La FI ? Ce courant manifeste une certaine immaturité et de la part de la FI un réel sectarisme avec sa direction "autoproclamée".
    D’autre part "la gauche plurielle" sous le niveau sigle "nupes" a déjà fait preuve de son inefficacité dans le passé pour ce qui relève du social et non du sociétal.
    Alors sur le plan politique il ne faut pas s’attendre à un renversement de table en l’absence par exemple d’une tactique commune entre la nupes et le RN qui a pris depuis longtemps la bannière de la retraite à 60/62 ans et 40 ans d’annuités, c’est après tout son cœur de votes. Avec quelques
    votes de députés du centre et même de Renaissance, la loi est kaput. Mais "la lutte contre le fascisme" de le Pen est pour la FI un seuil à ne pas franchir même comme tactique contre la réforme de Macron, au risque d’être stigmatisé comme "rouge brun" par l’extrême gauche.
    La question du rapport de force se retrouve donc à chaque grande question sociale posée aux Français. Et pas seulement.
    Regardons ce qui se passe en Grande Bretagne depuis 2 mois, après 40 ans de silence le mouvement social est en grève. La réponse du nouveau gouvernement est de "criminaliser" l’action syndicale !. En Allemagne les grèves se suivent aussi comme en Italie et en Espagne.. etc. Derrière la question sociale on trouve effectivement les décisions anti-sociales de l’UE.
    La pression se fait de plus en plus forte sur la France.
    Le Président Macron qui jurait "ça coûte un pognon de dingue" a reçu mandat de l’UE pour casser le système social Français. il ira jusqu’au bout.
    Seul un embrasement populaire pourra le combattre, dans l’unité, dans un vaste mouvement d’ensemble et pas avec des petits syndicats qui jouent déjà à la reconductibilité de la grève alors que le nombre de grévistes (essentiellement dans le secteur public) du deuxième mouvement vient de flancher. Quid du secteur privé ?
    Mai 68 a commencé en mars à Vincennes. Peu à peu le mouvement des jeunes a gagné le secteur salarié en Mai pour finir en Juin. Plus de 12 millions de salariés officiellement - mais en réalité le double car à la reprise du travail il fallait dire si l’on avait été gréviste ou empêché par les grève des transports à rejoindre le lieu de travail pour toucher son salaire intégralement - ont été en grève, petit à petit, avec le travail patient et sans relâche des syndicalistes, de comités de grève en comités de grève, d’Assemblées générales en assemblées générales et des manifestations. Un pas avait été franchi par les salariés pour aller au bout de leur lutte.
    Même si "l’histoire ne repasse pas les mêmes plats" cette expérience est à méditer pour le réussite du mouvement qui démarre actuellement.

  • Bonjour,
    tout d’abord un petit rappel :
     La quasi totalité des syndicats appelant aujourd’hui à manifester contre la réforme Macron-UE-BlackRock, avaient appelé clairement au second tour en avril dernier, à voter Macron, dans le programme duquel cette "réforme" était bien annoncée !!!
     La plupart de ces mêmes syndicats sont membres de la Confédération Européenne des Syndicats (CES) et à ce titre subventionnés par l’UE et c’est bien, sauf erreur de ma part, la même UE qui pousse la France à mettre en oeuvre rapidement cette "réforme".
     Les syndicats ne pointent pas les véritables marionnettistes dans cette affaire et se contentent de n’offrir que Macron "en pâture" aux Français alors que Macron (et ce n’est pas pour le défendre !) n’est qu’une des marionnettes de la Commission de Bruxelles et des fonds de pensions en embuscade dans cette affaire.
    Conclusion :
    Sans prendre en compte ces données essentielles pour en tirer ensuite toutes les conséquences, il y a fort à parier que "changer d’équipage" mais sans sortir du carcan "européen", ne modifiera rien sur le fond.
    Ajoutons pour être complet, que la quasi-totalité des "opposants" ne veulent pas entendre parler de cette sortie de l’UE, donc... échec probable du mouvement et c’est bien dommage.

  • @ Serge Marquis
    " il n’y a d’autre solution que le blocage du pays." C’est la solution, l’histoire l’a montré. Et donc, si ce n’est pas encore fait, c’est que c’est à faire, et si c’est à faire c’est parce qu’il y a retard dans la compréhension du moment politique où nous sommes, qu’il est donc nécessaire de montrer l’objectif indispensable à se fixer pour GAGNER.
    " Texte sympathique mais ne prenant pas en compte la situation réelle" Quelle condescendance. "On est foutu on pense trop", fichtre, eh là mon gaillard, tu aurais dû faire un effort, t’affranchir de tes conseils.

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