En situation de guerre, « tout pouvoir en place apparaît comme un ultime recours pour assurer la protection des peuples », entend-on à loisir sur les ondes. La guerre en Ukraine devait donc normalement, logiquement, servir la candidature d’Emmanuel Macron en suscitant un sentiment d’union nationale à laquelle le président appelait dès que le premier char de Poutine franchissait la frontière. Macron devait sortir grandi du drame vécu par les Ukrainiens et des crimes poutiniens (voir« l’Ukraine les vérités qui dérangent » ou encore « Nouvelles pensées sur le conflit en Ukraine ») . Les sondages en cascade venaient confirmer. À les entendre, encore un coup de canon et le candidat qui a ratiboisé « la gauche » et « la droite » serait élu dès le premier tour.
Macron met tout en œuvre. Là, président français, ici émissaire diplomatique au compte du « monde libre », ici encore président de l’Europe…
Mais la vie est capricieuse et contrarie souvent les changements de casquettes ou les retournements de veste.
Sous les ors de Versailles, les chefs d’État des pays européens ont festoyé pour trouver une réponse commune à l’agression russe. Le cadre était idéal pour le président français, chantre de la « souveraineté européenne », président de l’Europe pour six mois, drapé dans la bannière européenne pour accueillir ses hôtes dans le jardin royal.
Mais la cause était entendue d’avance, et l’échec patent prévisible. Comme nous l’avons déjà expliqué longuement ici, la souveraineté demande l’existence d’un peuple, et il n’existe pas un peuple européen, mais des peuples en Europe. La souveraineté européenne est une absurdité. L’Europe macronienne est apparue dans sa réalité que seuls les partisans de la mondialisation sans frontières et de la destruction des nations veulent nier.
À Versailles donc, il devait être question de l’Europe de la défense, de l’Europe unie, d’une réponse commune sur la question énergétique. C’est ainsi que l’Allemagne et l’Italie dépendant du gaz russe ont mis fin aux fantasmes de Macron. Pour l’Europe de la défense, vieille rengaine s’il en est, la cause aussi est entendue avec le réarmement de l’Allemagne qui passe commande aux États-Unis pour se fournir, cela au détriment des usines Dassault par exemple. Et pour l’Europe humanitaire, la volonté de voir l’Ukraine rentrer dans l’UE, de madame Van der Leyen ou de la Française macronienne Nathalie Loiseau, a été remise aux calendes grecques.
À moins d’un mois du premier tour des élections présidentielles, on pouvait attendre que ces questions soient débattues, argumentées, confrontées. Et bien non. Le président candidat en a décidé autrement et les institutions se plient. Il ne sera pas question des sujets qui éventuellement pourraient desservir un exécutif qui aspire à se maintenir au pouvoir pour parachever son œuvre, notamment sur les causes de la révolte qui s’est exprimée durant ce quinquennat maudit, les retraites, la protection sociale, les salaires, la fonction publique, le pouvoir d’achat, l’école, la santé, l’abaissement de la Nation, et quelques autres sujets.
C’est la démocratie et son déni qui sont au centre d’une situation inédite. Jamais comme cela est le cas aujourd’hui, un candidat n’a été servi comme l’est Emmanuel Macron. Campagne menée par le président pas encore candidat grâce aux impôts des Français, changement d’identité entre le président et le candidat en fonction de l’intérêt du moment, complaisance médiatique totale au prétexte de la guerre, refus des sujets interdits et utilisation des fonds publics comme une manne présidentielle alors que l’heure des comptes, dont nul de parle, approche.
Nous assistons à une gigantesque manipulation dont les peuples, à des degrés divers, sont aujourd’hui les victimes apparemment impuissantes… L’avenir est sombre. Mais parions que la clarté qui en France ne surgira peut-être pas des élections surgira ensuite. Car, quel que soit l’heureux élu, c’est une chose d’accéder au pouvoir, c’en est une autre de gouverner…
Jacques Cotta